LA SUSPENSION ET L'EXPULSION D'UN MEMBRE (PARTIE 1)
Le contenu du présent site est protégé par le droit d’auteur et peut être reproduit uniquement dans sa forme intégrale et originale avec mention obligatoire de la source.
Par le Service juridique du Regroupement Loisir et Sport du Québec et son Centre québécois de services aux associations
Depuis quelques mois, Yvan Tannant donne du fil à retordre à tout le monde au sein de l’Association. Il ne paie plus sa cotisation, arrive fréquemment ivre aux activités de groupe et insulte sans ménagement les autres membres. Les plaintes à son sujet pleuvent, et la belle ambiance qui régnait autrefois lors des activités de l’Association a disparu.
À l’assemblée générale annuelle, Yvan explose soudainement de colère, accuse sans raison valable les administrateurs d’avoir fraudé l’Association et menace d’aller ternir la réputation de l’Association devant les médias. Dans son élan, il s’en prend physiquement au trésorier de l’Association, obligeant les autres membres à faire venir les policiers sur les lieux. C’en est trop ! Le conseil d’administration décide qu’Yvan Tannant doit être expulsé, car son comportement porte sérieusement atteinte aux intérêts de l’Association. Mais l’Association peut-elle expulser Yvan sans autre formalité ?
Nous remarquons en droit associatif une tendance des tribunaux à reconnaître des droits de plus en plus importants aux membres d’un organisme sans but lucratif relativement à leur membership. Ainsi, il est de plus en plus difficile pour les organismes ou associations de se départir d’un membre problématique sans respecter d’abord certaines étapes, et sans qu’un certain nombre de conditions soient réunies.
Comment savoir si un organisme peut sanctionner un membre ? D’abord, ce pouvoir doit être prévu dans les règlements généraux de l’organisme. Les motifs généraux justifiant la suspension ou l'expulsion d'un membre doivent également apparaître dans les règlements généraux. Il n’est toutefois pas nécessaire que ces motifs soient décrits en détail. En effet, nous estimons qu’il serait suffisant, par exemple, de mentionner dans les règlements généraux que le défaut de respecter les règlements de la corporation ou une conduite préjudiciable à la corporation constituent des raisons pouvant mener à une sanction.
La procédure applicable en cas de sanction doit également être mentionnée dans les règlements généraux de l’organisme. Cette procédure doit comprendre une audition en bonne et due forme du membre fautif. En effet, les tribunaux ont établi qu’on ne pouvait pas sanctionner un membre sans d’abord avoir respecté les règles de justice naturelle. Ces dernières incluent le droit pour le membre de connaître la nature exacte de ce qui lui est reproché, le droit d’être entendu et le droit de présenter une défense pleine et entière. Enfin, le membre doit pouvoir faire ses représentations devant une instance qui agit de bonne foi et qui est impartiale. Une transgression de ces règles de justice naturelle pourrait faire en sorte qu’une décision de suspension ou d’expulsion d’un membre soit renversée par un tribunal, qui pourrait en outre condamner l’organisme au versement de dommages-intérêts.
Le pouvoir d’entendre le membre et d’émettre une sanction est confié à l'instance ou aux instances mentionnées dans les règlements généraux. Ce pouvoir peut être exercé par le conseil d’administration, mais il pourrait également être délégué au comité exécutif (s’il y en a un), à un comité permanent prévu à cette fin (tel qu’un comité de discipline), ou à un comité ad hoc spécialement formé par le conseil d’administration pour exercer ce pouvoir.
Dans la deuxième partie de la présente chronique, nous abordons les règles de preuve et de procédure généralement suivies par les organismes lors de l’audition de cas en matière disciplinaire, ainsi que les conséquences de la suspension ou de l’expulsion d’un membre.
Publication avril 2014
Dernière révision mai 2023
Vous désirez plus d'information? Communiquez avec l'équipe des services professionnels du Regroupement