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CHRONIQUES ET RESSOURCES





L'employé a droit à sa vie privée, même sur l'ordinateur de son employeur

 

Nous publions sur ce site des chroniques vulgarisées qui visent à répondre aux préoccupations juridiques fréquentes des organismes sans but lucratif. Toutefois, l’information contenue dans ces chroniques est de nature générale et ne constitue d’aucune façon une opinion ou un conseil juridique. Pour répondre à vos questions spécifiques, nous vous recommandons de rejoindre nos avocats au (514) 252-3137, qui vous proposeront les solutions les mieux adaptées à votre situation précise et à vos besoins.

Le contenu du présent site est protégé par le droit d’auteur et peut être reproduit uniquement dans sa forme intégrale et originale avec mention obligatoire de la source.

 

En tant qu’employeur, vous croyez pouvoir fouiller en tout temps le contenu des ordinateurs utilisés au travail par vos employés ? En tant qu’employé, vous pensez qu’il est au contraire illégal pour un employeur de vérifier ce que vous faites sur votre outil de travail ? Une décision rendue par la Cour suprême à la fin octobre pourrait relancer la réflexion sur le sujet…

Dans R. c. Cole (2012 CSC 53), il est question d’un enseignant, M. Cole, qui s’était vu confier pour sa tâche un ordinateur portatif appartenant au conseil scolaire. Une politique du conseil scolaire l’autorisait à utiliser l’objet en question à des fins personnelles de façon occasionnelle. Or, un technicien qui effectuait des travaux de maintenance sur l’ordinateur de M. Cole y a un jour découvert du matériel pornographique. Il s’est donc empressé d’en aviser le directeur de l’école. Le contenu de l’ordinateur a été transmis aux policiers, qui l’ont examiné et ont requis une expertise judiciaire, le tout sans avoir préalablement obtenu un mandat de perquisition. La Cour suprême a tranché que le droit à la vie privée de M. Cole avait été violé, car en vertu de l’article 8 de la Charte des droits et libertés, nul ne peut être soumis à des fouilles ou saisies abusives de la part de l’État. Les policiers auraient donc dû requérir un mandat.

Bien sûr, cette décision a été rendue en matière criminelle. Nous sommes toutefois d’avis qu’elle constitue un prétexte intéressant pour faire un rappel concernant l’expectative de vie privée également présente pour les employés, dans une certaine limite, en matière de droit du travail.  

En effet, ce n’est pas parce que l’ordinateur appartient à l’organisme, donc à l’employeur, que ce dernier peut aller fouiller quand bon lui semble dans les fichiers et la messagerie électronique qui s’y trouvent !

Certes, en vertu de son droit de gérance, il est légitime que l’employeur qui fournit à un employé du matériel informatique exige que celui-ci soit utilisé pour les fins de son travail. Il est également logique qu’un patron dispose, dans une certaine mesure, d’un droit de surveillance sur les activités de ses salariés. Il n’en reste pas moins que la jurisprudence a reconnu au cours des dernières années que les employés avaient droit à leur vie privée, et ce même sur les lieux du travail ! L’employé doit par contre s’attendre à ce que sa sphère de vie privée et de confidentialité soit évidemment plus restreinte quand il est au bureau.

Alors, comment faire pour garder un certain contrôle et s’assurer que les employés n’abusent pas des ressources informatiques à des fins personnelles ?

1)Nous recommandons d’abord aux organismes de mettre en place, si ce n’est pas déjà fait, des politiques dans le but de réduire les attentes que les employés pourraient avoir en matière de vie privée au travail. À titre d’exemple, il serait pertinent que l’employeur prépare des politiques concernant l’utilisation des systèmes de messagerie courriel, de l’accès à Internet, de la propriété des ordinateurs fournis pour le travail, et même des autres outils électroniques (tels que les téléphones intelligents). Il faudrait préciser clairement quelles sont les limites permises pour l’utilisation à des fins personnelles du matériel informatique, et ce qui est toléré ou ne l’est pas. Les employés devraient signer ces politiques afin de démontrer qu’ils en ont pris connaissance et qu’ils acceptent de s’y conformer.

2)Par ailleurs, l’employeur peut, uniquement s’il dispose de motifs raisonnables de le faire, mettre un salarié sous surveillance relativement à son utilisation du matériel informatique. Ces motifs raisonnables doivent cependant exister avant de procéder à une enquête juste et équitable, et ne peuvent se justifier après coup selon les informations recueillies lors de l’enquête!

 

Publication novembre 2012